Etat, démocratisation culturelle et territoires.
Suite : à propos d'un rituel républicain caractéristique de la quasi monarchie qu'est notre Cinquième République, à propos des droits culturels et de la Fédération Nationale des Collectivités pour la Culture (FNCC).
Action culturelle : comment mieux coopérer sur un territoire, en prenant en compte les personnes et autres organisations qui l'habitent ?
Episodes précédents :
Monsieur le Président, je vous fais une lettre.
Droits culturels et mémoire courte.
Diversité et droits culturels.
En juillet 2013, la FNCC professait :
Le donner de la démocratisation doit aujourd’hui s’enrichir du écouter de la démocratie culturelle.
Aujourd'hui , elle interpelle le futur Jupiter :
Promouvoir le respect des droits culturels à l’horizon des politiques culturelles : soutien à la diversité de la création, participation et contribution des citoyennes et des citoyens, accompagnement des pratiques.
Quelles mesures concrètes prendrez-vous pour le respect des droits culturels inscrits dans les lois NOTRe et LCAP ?
Même si, fort heureusement, la référence aux droits culturels fait toujours débat - Les droits culturels en question (s) - ses mises en œuvre effectives n'attendent pas un blanc seing de l’Élysée, ni les labels de la rue de Valois pour se réaliser sur les territoires.
Au delà de l'étrange position actuelle de la FNCC (qui constitue une rupture avec sa propre histoire) et pour qui voudrait vérifier qu'en 2013 l'intérêt de la FNCC pour la question des droits culturels n'était ni un effet de mode, ni une adhésion aveugle, la lecture d'un très consistant dossier de février 2020 semble s'imposer.
"En France, cette notion continue à susciter des réserves mais aussi des difficultés d’appréhension tant elle semble aller à l’encontre des principes et objectifs premiers des politiques culturelles telles que déployées depuis soixante ans : la démocratisation culturelle et l’universalité des arts et de la culture. Pour autant, certaines collectivités et certains acteurs culturels s’en sont déjà pleinement saisi (...)"
Un exemple, parmi tant d'autres.
Le collectif Pour une démarche de progrès par les droits culturels, coordonné par l’UFISC, en partenariat avec la FERAROCK, vous propose Chemins Faisant, un podcast en 10 épisodes, pour partir à la rencontre d'actrices et d'acteurs culturels, pour qui les droits culturels, ce ne sont pas juste des mots.
Comment mieux coopérer sur un territoire, en prenant en compte les personnes et autres organisations qui l'habitent ? Comment animer un projet collectif, en impliquant une diversité de bénévoles ? Comment déjouer les rapports de domination ?
Comment favoriser l’émancipation et l’expression artistique des personnes ?
Comment tisser des relations plus réciproques ? Dix structures proposeront leurs réponses à ces questions, vous faisant parcourir des territoires de Nouvelle Aquitaine, flâner dans des quartiers de Grenoble, Tours ou Nice, ou encore sillonner les routes de l’Ariège.
Réseaux professionnels, lieux ou compagnies, coopérative d'arts visuels, centre de ressources, chorégraphe, bus itinérant... des acteur·ice·s artistiques et culturels évoquent dans Chemins Faisant leur rapport aux droits culturels et témoignent de la manière dont, à travers leurs pratiques, il·elle·s essaient de les favoriser au quotidien.
Quant à la FNCC, elle a une histoire.
Construite au regard la politique culturelle conduite par l’État à partir de 1959.
La FNCC a été créée sous le nom de Fédération nationale des centres culturels communaux (FNCCC) en juillet 1960 par Michel Durafour, alors maire-adjoint à la culture de la Ville de Saint-Étienne.
En 1959, après avoir dirigé le ministère de l’Information, André Malraux fonde le ministère de la Culture. Avec une conception fortement centralisée de la politique culturelle qui a tendu à minimiser les ambitions et réalisations culturelles des communes. Une approche « descendante » que synthétisait ainsi le directeur du théâtre et des métiers de la culture d’alors : « La plupart du temps, les municipalités ont des activités culturelles, elles n’ont pas de politique… »
C’est face à cette vision jacobine que, fort de son expérience d’élu local à Saint-Étienne ayant créé, en 1959, un centre culturel communal, Michel Durafour décide de mettre en pratique son intuition première : le déploiement de politiques culturelles ambitieuses passe par leur prise en main par les collectivités territoriales. Ainsi naît l’idée aujourd’hui admise par tous de décentralisation culturelle, pendant de la déconcentration culturelle dans laquelle s’engageait alors le ministère avec la création des Maisons de la culture, dans le sillage de la décentralisation théâtrale inaugurée par Jeanne Laurent dès le lendemain de la Deuxième Guerre mondiale.
Convaincu qu’il existe dès la fin des années 50 « un nouvel état d’esprit chez de nombreux maires » favorable à un engagement culturel municipal, Michel Durafour regroupe autour de lui, en 1960, un petit noyau de maires, puis interpelle toutes les villes de plus de 20 000 habitants. Avec un taux de réponses positives de 80%. Une interpellation qui s’imposait donc…
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Quant à la perspective de leur fédération, ces mots de Michel Durafour lors de son premier discours : « Il va falloir dire si nous allons continuer à nous présenter en ordre dispersé devant les pouvoir publics ou si, au contraire, nous allons faire valoir nos droits. » Puis il précise sa pensée politique : « décider, une fois pour toutes, si la décentralisation va devenir une réalité ou si elle ne restera qu’un mot. Croyez-moi, si la province se fédère, un grand pas sera fait et des talents inconnus se feront jour. »
Tout va alors très vite avec l’organisation, les 14 et 15 mai 1960, d’un “congrès national des centres communaux” à Saint-Étienne .
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Trois commissions se réunissent l’après-midi du 14 mai. Toutes abonderont l’intuition et l’ambition de Michel Durafour. L’une d’elles, chargée de travailler à la formation d’une Fédération de centres culturels communaux (FNCCC), lui donne pour mission « le regroupement et la coordination de toutes les associations culturelles [en liaison avec les municipalités] en dehors de toute préoccupation philosophique, confessionnelle ou politique ».
Le principe de pluralisme politique, sur lequel la FNCCC, devenue Fédération nationale des collectivités territoriales pour la culture (FNCC), ne reviendra jamais.
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Michel Durafour n’a pas fondé seul la FNCCC, ce dont témoignent ces récents propos (mars 2018) de son vice-président, récemment disparu, Gérard de Vassal : « Michel Durafour nous réunissait dans un petit café à Saint-Étienne. Je me souviens d’une réunion, où était présent Jean Vilar. » Dès l’impulsion originelle, il y avait aux côtés du président-fondateur d’autres élus : Jean-Paul Fuchs (Colmar), Louis-Charles Vincent (Nevers), puis Jack Ralite (Aubervilliers), Denise Foucard (Champigny) et bien d’autres.
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Voir aussi :