Ambiguïté et polyphonie de l’identité

Publié le par Jean-Claude Pompougnac

Suite des approches critiques des notions d’identité et de « culture » en vue de déconstruire les conventions et la vulgate en usage dans l’auto proclamé « monde de la culture ».

 

Quelques travaux universitaires pour alimenter le débat.

 

 

Chapitres précédents.

 

Identité, diversité, laïcité

Identité, culture, laïcité

Identifié, diversité, émancipation.

Les Statues meurent aussi.

L’ordinaire du « monde de la culture »

 

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En premier lieu

Identité culturelle, identité nationale (1989)

Etienne Balibar, 1989

texte majeur, déjà publié sur La Cité des sens

 

En préambule, extraits d’un entretien postérieur (2011) accordé au journal l’Humanité.

 

Étienne Balibar : Je ne m’intéresse absolument pas à la question de savoir s’il faut être pour ou contre les revendications identitaires. Ce que je dis, c’est qu’il y a dans l’universalisme bourgeois un problème insoluble. Les différences sexuelles, culturelles, celles entre le normal et le pathologique acquièrent dans le cadre de l’universalité bourgeoise un statut extrêmement paradoxal. Elles sont le lieu d’un malaise permanent. Dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, l’idée selon laquelle les différences entre les individus pourraient se traduire par des discriminations est récusée. Mais, dans les faits, on constate immédiatement que la société bourgeoise classe les individus, y compris pour ce qui est de leur accès à la citoyenneté ou à la responsabilité, d’après leurs différences.

D’un côté, il faut donc revendiquer l’universalité des droits ; de l’autre, refuser d’être rabattu sur un seul modèle d’humanité, par exemple le modèle sexuel dominant fourni par la masculinité hétérosexuelle. Par conséquent, il faut revendiquer la différence.

 

Laurent Etre : Mais vous écrivez en même temps que les différences anthropologiques sont en tant que telles « indéfinissables ». Dans ce cas, pourquoi faire de leur reconnaissance un enjeu de citoyenneté ? Il y a là un paradoxe…

 

Étienne Balibar: Oui, mais ce paradoxe a un sens. Ce qu’il faut réussir à comprendre, c’est que la violence se situe aussi bien du côté de la fixation des différences que dans leur refoulement ou leur répression. Il n’y aura donc jamais de réponse politique simple. Les sujets poursuivent nécessairement des objectifs contradictoires. En réalité, ils ont besoin à la fois de l’universalité des droits et de la reconnaissance des différences. Mais ces différences ne sont pas des identités fixes.

L’intérêt du droit à la différence, ce n’est pas que chaque catégorie d’individus se trouve étiquetée et enfermée dans une seule place. Ce qu’il faut faire respecter, c’est l’ambiguïté qui caractérise tout individu humain. Il est extrêmement violent de vouloir fabriquer une société d’individus « normaux ».

Laurent Etre. :  Mais toute norme induit-elle une violence ? La norme, ce peut être simplement le fait majoritaire. Ce n’est pas forcément la négation de ceux qui sont en dehors…

 

Étienne Balibar. : Je ne dis pas que toute définition de norme est également violente. Mais je dis que c’est toujours une violence potentielle. Judith Butler, figure de la réflexion sur le genre, montre que toute identité assignée, tout rôle social et en particulier sexuel, assigné par la société ou par les normes sociales, est fondamentalement plastique, réversible, modifiable.

Autrement dit, l’enjeu n’est pas de vivre sans aucune norme, mais de résister à la norme, de pouvoir jouer avec. En définitive, il s’agit toujours de déjouer l’alternative entre le conformisme et l’exclusion.

 

Extraits de  ENTRETIEN AVEC LE PHILOSOPHE ÉTIENNE BALIBAR

(Novembre, 2011)

© L’Humanité, entretien réalisé par Laurent Etre.

 

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Polyphonie et métamorphoses de la notion d'identité

Claude Dubar

Revue française des affaires sociales 2007

 

La notion d’identité a des définitions multiples dans la vie courante, les médias, les travaux philosophiques ou scientifiques. Mais, même dans ces derniers, elle n’est pas toujours définie de manière claire et opératoire. Or les définitions et les degrés de pertinence de cette notion sont au cœur de plusieurs paradoxes et polémiques qu’il importe de connaître et comprendre avant de trancher quant à la légitimité de ses différents usages.

C’est ce qu’écrivait, à sa manière, il y a juste trente ans, Lévi-Strauss en conclusion du séminaire pluridisciplinaire qu’il lui avait consacré au Collège de France : « Toute utilisation de la notion d’identité commence par une critique de cette notion » (Lévi-Strauss, 1977, p. 331).

Dans cet article, je m’efforcerai de suivre quatre pistes à partir de quatre perspectives sur l’identité. Une approche « essentialiste », d’origine philosophique, qui fait de l’identité « ce qui reste identique dans le temps » ( Qu’est-ce que l’être en tant qu’être ?). Une approche « psychologique » reconnaissant la pluralité des identités en tant que « définitions de Soi » ( Qui suis-je ?). Une approche « interactionniste » pour qui l’identité est une relation entre assignation par les autres et revendication par soi ( Que faisje de ce que les autres disent de moi ?). Une approche « nominaliste » pour laquelle l’identité est une forme discursive inséparable d’une interprétation biographique ( Comment rendre compte du cours de ma vie ?). Dans tous les cas, sera abordée, sinon résolue, la question des conditions d’usage des définitions de cette notion hautement polysémique et polémique.

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Laïcité et identité culturelle

Geneviève Zoïa (2012)

 

Cet article questionne le principe français de laïcité dans sa mise en œuvre appliquée à l’espace public, en particulier scolaire, et dans sa capacité à répondre aux défis de la fragmentation culturelle de la société. Nous montrons que le principe de laïcité véhicule depuis les origines des formes, déniées mais ordinaires, d’attachement communautaire, et qu’il est une donnée sensible de culture.

Nous montrons que le lien national républicain représente une forme supérieure, abstraite et rationnelle, de lien social.

La légitimité de ce modèle repose sur une différence de valeur entre la culture et les cultures, modèle qui ne permet pas aujourd’hui l’intégration des divers groupes culturels autour d’un bien commun.

 

Accéder à l’article.

 

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Identités et catégorisations sociales

Magali Bessone, Alexis Cukier, Christian Lazzeri et Marie-Claire Willems

 

Ce numéro de Terrains/Théories est consacré à la question des identités ainsi qu'aux effets de la catégorisation sociale sur l’assignation identitaire et la réification sociale qu’elle produit.

Le débat contemporain sur l’identité voit s’affronter plusieurs conceptions de l’identité dont les oppositions ne sont pas nécessairement superposables.

La première d’entre elles est certainement celle qui oppose le constructivisme social au naturalisme. On peut désigner, au sens large, le constructivisme social comme une nébuleuse de positions théoriques qui découlent aussi bien du kantisme, de la sociologie phénoménologique, de la psychologie du développement ou de la sociologie critique. On peut discerner au moins trois niveaux d’analyse concernant la manière de « construire » la réalité sociale en général et les identités en particulier.

(…)

Accéder au numéro de la revue Terrain/Théorie

 

 

 

Votre blog a donné lieu à une création de notice bibliographique dans le catalogue de la

Bibliothèque nationale de France.

 

Il lui a été attribué un numéro international normalisé

ISSN : 2270-3586

Type : document électronique, publication en série
Auteur(s) : Pompougnac, Jean-Claude (1946-....
 ). Auteur du texte
Titre clé : La Cité des sens

Titre(s) : La Cité des sens [Ressource électronique] : le blog de Jean-Claude Pompougnac
Type de ressource électronique : Données textuelles et iconographiques en ligne
Publication : [Fresnes] : [Cité des sens], 2006-

Note(s) : Blogue. - Notice rédigée d'après la consultation de la ressource, 2013-11-14
Titre provenant de l'écran-titre

Périodicité : 

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